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1905 : SEPARATION DES EGLISES ET DE L'ETAT

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Le contexte

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- L'affaire Dreyfus (1894 à 1906). L'opinion catholique perd de son influence après s'être majoritairement engagée dans le camp antidreyfusard, ce qui renforce la victoire des républicains aux élections de 1898.

- 1902 : nouvelle victoire des républicains aux élections législatives.

Il y a une opposition au sein de la gauche républicaine entre anticléricaux et modérés. La loi de 1905 sera une loi d'apaisement, de compromis, pas une loi de combat contre l'Eglise.

- 1904 : incident diplomatique avec le Pape : se pose la question de la souveraineté de l'état français face au pouvoir de la hiérarchie catholique, d'où une volonté d'émanciper le pays de l'influence du Vatican.

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Source : La laïcité en questions,  "La grande oeuvre de la IIIe République", site de la Bibliothèque Nationale de France.

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La loi de 1905 n'est pas une croyance de plus ni une religion de l'incroyance : elle signifie la neutralité de l'état en matière de religion.

 

Que permet-elle ?

- elle permet à toutes les croyances de coexister

- elle permet la liberté de croire et de ne pas croire

- elle permet liberté de pratiquer et de ne pas pratiquer

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L'opposition républicaine devient anticléricale sous le Second Empire parce que l'Eglise a soutenu le retour d'un régime de type monarchique. Elle exerce donc un pouvoir politique anti-républicain.

Gambetta en 1869 réclame la séparation des Eglises et de l'Etat et l'abolition du Concordat mis en place par Napoléon.

 

"Deux France s'opposent, celle du curé et celle de l'instituteur"

Les deux France "du curé et de l'instituteur" renvoient à l'opposition au sujet de l'éducation : les catholiques favorables à l'enseignement religieux d'avant les lois de Jules Ferry ("le curé"), et les républicains favorables à l'enseignement laïque ("l'instituteur").

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La grande bataille parlementaire de 1905

10 février : les députés votent un débat sur séparation.

Sous la présidence de Ferdinand Buisson, une commission spéciale est nommée pour préparer le débat.

21 mars 1905 : 1ère séance de la discussion parlementaire qui va durer toute l'année.

C'est un débat fleuve : 48 séances, 1500 pages de comptes rendus dans le Journal Officiel.

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A retenir : il y eut des débats autant au sein de la gauche républicaine qu'au sein des catholiques, dont seule une fraction refusait le débat. La loi de 1905 est une loi d'apaisement et de compromis, pas une loi anticléricale.

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1906 : violences lors des inventaires des biens dans les églises, le gouvernement tombe.

Aristide Briand, ministre des cultes, avec Clémenceau, ministre de l'intérieur, décident de suspendre les inventaires et d'appliquer la loi en douceur. Cet épisode montre que la séparation fut difficile, la mainmise de l'Etat sur les biens de l'Eglise, même une fois la loi passée, ne se fit pas sans violence.

Une loi de raison

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La loi de 1905 se caractérise par trois idées-forces :

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- Une double liberté, de conscience et de culte. dès l'article 1 : "La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes."

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-- L'indépendance réciproque de l'État et des Églises indiquée dans l'article 2 : "La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte".

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- Par le titre cinq, dit de "police des culte" : la loi y définit la liberté du culte comme une liberté publique devant s'exercer dans le respect de l'ordre public et des personnes.

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Source : dossier "La laïcité en question" du site de la Bibliothèque Nationale de France.

Loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat.

Version consolidée au 06 mars 2008

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Article 1

La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l'intérêt de l'ordre public.

 

Article 2

La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. En conséquence, à partir du 1er janvier qui suivra la promulgation de la présente loi, seront supprimées des budgets de l'Etat, des départements et des communes, toutes dépenses relatives à l'exercice des cultes.

 

Article 12 Modifié par Loi n°98-546 du 2 juillet 1998 - art. 94

Les édifices qui ont été mis à la disposition de la nation et qui, en vertu de la loi du 18 germinal an X, servent à l'exercice public des cultes ou au logement de leurs ministres (cathédrales, églises, chapelles, temples, synagogues, archevêchés, évêchés, presbytères, séminaires), ainsi que leurs dépendances immobilières et les objets mobiliers qui les garnissaient au moment où lesdits édifices ont été remis aux cultes, sont et demeurent propriétés de l'Etat, des départements, des communes et des établissements publics de coopération intercommunale ayant pris la compétence en matière d'édifices des cultes.

 

Article 25

Les réunions pour la célébration d'un culte tenues dans les locaux appartenant à une association cultuelle ou mis à sa disposition sont publiques. Elles sont dispensées des formalités de l'article 8 de la loi du 30 juin 1881, mais restent placées sous la surveillance des autorités dans l'intérêt de l'ordre public.

 

Article 26

Il est interdit de tenir des réunions politiques dans les locaux servant habituellement à l'exercice d'un culte.

 

Article 28

Il est interdit, à l'avenir, d'élever ou d'apposer aucun signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou en quelque emplacement public que ce soit, à l'exception des édifices servant au culte, des terrains de sépulture dans les cimetières, des monuments funéraires, ainsi que des musées ou expositions.

 

Article 31

Sont punis de la peine d'amende prévue pour les contraventions de la 5ème classe et d'un emprisonnement de six jours à deux mois ou de l'une de ces deux peines seulement ceux qui, soit par voies de fait, violences ou menaces contre un individu, soit en lui faisant craindre de perdre son emploi ou d'exposer à un dommage sa personne, sa famille ou sa fortune, l'auront déterminé à exercer ou à s'abstenir d'exercer un culte, à faire partie ou à cesser de faire partie d'une association cultuelle, à contribuer ou à s'abstenir de contribuer aux frais d'un culte.

 

Article 32

Seront punis des mêmes peines ceux qui auront empêché, retardé ou interrompu les exercices d'un culte par des troubles ou désordres causés dans le local servant à ces exercices.

 

Le rôle d'Aristide Briand

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Caricature par MILLE (Felix Antoine Marmonier ) pour une carte postale de 1905.

Le dessin représente Aristide Briand entre l'Etat (Marianne) et l'Eglise (le prêtre en soutane), et sa volonté conciliatrice : "Puisqu'il le faut, séparez-vous. Mais tâchez de rester bons amis."

Aristide Briand, artisan de la loi et pacificateur

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« L’Etat n’est pas antireligieux, il est areligieux »

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Aristide Briand fut le rapporteur du projet de la loi 1905 à l'Assemblée Nationale. Il a largement contribué à l'élaboration puis au vote de cette loi d'apaisement et de compromis.

 

Après avoir été avocat puis journaliste, il se lance en politique et devient en 1902 député socialiste de la Loire. L’un des premiers textes sur son bureau va entrer dans l’histoire : il participe aux travaux préparatoires de la loi de séparation des Églises et de l'État, en tant que rapporteur, aux côtés du président de la commission Ferdinand Buisson.

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Rapport de mars 1905 dans lequel Aristide Briand présente le projet de la loi de séparation des Églises et de l'État.

 

Synthèse et compromis. Bien vite, les deux hommes se rendent compte que la tâche sera ardue. Pour faire passer le projet, il faut à la fois composer avec des députés d’une gauche radicale, qui souhaitent imposer une vraie mainmise de l’État sur l’Église, et une droite catholique qui refuse purement et simplement ce texte. Si Aristide Briand estime que cette loi de séparation est nécessaire, il ne souhaite pas pour autant diviser le pays. Dès lors, sa ligne de conduite est celle de la synthèse, du compromis, avec un talent oratoire reconnu de tous. C’est ce qui lui permet de convaincre une majorité de députés lors des débats, et que le projet de loi soit voté à 341 voix pour et 233 contre le 6 décembre 1905.

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Aristide Briand est ensuite en charge de son application, en devenant ministre de l’Instruction publique et des Cultes.

 

L’homme d’Etat. Ce texte marque le début d’une grande carrière politique pour Aristide Briand. Au total, entre 1906 et jusqu’en 1932, il sera désigné onze fois président du Conseil et vingt-six fois ministre sous la IIIe République. Son art du compromis reste sa marque de fabrique tout au long de ces années. Lors de l’élection présidentielle de 1920, en tant que socialiste indépendant, il n’hésite pas ainsi à discuter avec la droite catholique pour faire échouer Clemenceau et permettre l’accession au pouvoir de Paul Deschanel.

 

Prix Nobel de la paix en 1926. Ce rôle de pacificateur connaît un rayonnement au-delà des frontières françaises. Acteur-clé de la fondation de la Société des Nations, chargée de maintenir la paix en Europe après la Première Guerre mondiale, Aristide Briand est aussi derrière les accords de Locarno, dont l’ambition reste la conciliation entre les anciens belligérants de la Grande Guerre. C’est ce qui lui vaut, en 1926, de recevoir le prix Nobel de la paix avec son homologue allemand Gustav Stresemann. Il est aussi à l’initiative du pacte Briand-Kellogg. Ce texte, signé par 63 pays, condamne "le recours à la guerre pour le règlement des différends internationaux et y renonce en tant qu'instrument de politique."

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Source : Fabrice d'Almeida, "La loi de 1905 : une séparation historique."

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Couverture du journal humoristique Le Rire du 20 mai 1905

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Marianne et l'Eglise apparaissent comme deux personnages siamois qu'il faut séparer de force. La légende précise que l'opération se déroule avec "beaucoup de Briand", pour rappeler le rôle de ce ministre dans la loi de 1905.

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Gravure satirique anonyme représentant la séparation de l'Eglise et de l'Etat, Musée Jean Jaurès, Castres.

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Cette lithographie allégorique représente de manière humoristique le Républicain anticlérical Emile Combes, rompant le lien (la corde) entre la République (Marianne) et l'Eglise (le Pape), sous l'inspiration de Voltaire qui lui transmet de la force. La présence du moine en bas à droite, allongé en train de décuver croix à la main montre clairement la vision anticléricale du graveur.

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QA/LEA/OW

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